Flora Brasiliensis 3.0
Les Désobéissances
Alcantarea imperialis
Oenocarpus bacaba Mart.
Alcantarea imperialis
détail
Vue d'exposition
Exposition personnelle 'Les Désobéissances'
galerie Caroline O'Breen, Amsterdam, Pays-Bas, 2023
Ravenala madagascariensis Sonner
Neoregelia compacta
Cattleya forbesii Lindl.
Alcantarea imperialis
Vue d'exposition
Exposition personnelle 'Les Désobéissances'
galerie Caroline O'Breen, Amsterdam, Pays-Bas, 2023
Dalia coccinea Cav.
Flora Brasiliensis 3.0
Les Désobéissances
Entre 1840 et 1906, sur l’initiative de l’Allemand Friedrich Philipp von Martius, des naturalistes allemands et autrichiens publient 'Flora Brasiliensis’ ; une encyclopédie de 15 volumes dans lesquels ils répertorient, sur plus de 10 000 pages, 22.767 espèces végétales du Brésil. Cette œuvre colossale permettra de rassembler des savoirs et d’informations sur les plantes du territoire brésilien, considéré.e.s comme important.e.s jusqu’à aujourd’hui. L’ouvrage jouera également un rôle clé dans la construction de l’imaginaire européen sur le Brésil.
Dans 'Flora Brasiliensis 3.0', Elsa Leydier propose une réinterprétation « 3.0 » de ces volumes encyclopédiques. A travers un ensemble de visuels de plantes extraits d’encyclopédies contemporaines sur la flore brésiliennes, ré-interprétées dans une écriture propre à l’ère du numérique (tant par leur esthétique que par les supports sur lesquels elles sont montrées), il s’agit de prendre une certaine distance face à l'approche occidentalo-centrée de la préservation et de la transmission des savoirs sur la nature. 'Flora Brasiliensis 3.0' pose la question de la pertinence de la conservation et du catalogage du Vivant tels que nous les pratiquons et comprenons actuellement en Occident.
Ces questionnements s’incarnent d’abord à travers la mise en doute du réalisme des images qui composent le travail, puis à travers une mise en parallèle avec la question de la préservation d’une œuvre d’art.
L’entreprise que peut représenter l’idée de contenir les données d’écosystèmes entiers sur des dizaines de milliers de planches botaniques et de notes taxinomiques peut en effet questionner. Est-ce une manière pertinente de préserver le Vivant? La question se pose notamment lorsque l’on sait que des savoirs sur des plantes et la nature provenant de plusieurs millénaires en arrière (certains datant de plus de 5000 ans) nous sont parvenus jusqu’à aujourd’hui grâce aux peuples autochtones, qui les ont préservés à travers l’oralité et d’autres moyens de transmission — parfois situés dans la nature elle-même.
Ce sont ces questions qui poussent Elsa Leydier à porter un regard critique sur la pertinence nos méthodes contemporaines de préservation de la nature, matérialisées à travers son « enregistrement » par des images, puis le stockage et le catalogage de ces images.
Les distortions volontairement exagérées des images de 'Flora Brasiliensis 3.0' viennent créer une flore à l’esthétique suspecte, ne relevant de tout évidence pas du « naturel ». Ce rendu vient souligner les lacunes et les décalages inévitablement engendrés par nos tentatives de représentations de la nature.
Les images du travail sont produites et montrées de trois manières et sur trois supports différents.
Elles le sont d’abord selon les codes communément admis de la photographie artistique : des tirages 'fine art', encadrés, sous verre musée.
L’image existe également sous la forme d’un fichier numérique déposé sur une clé USB.
Enfin, l’image existe également au format NFT, stockée sur une blockchain.
Chaque image existe ainsi dans une déclinaison de trois versions; sur trois supports de stockage d’images et dans trois différents formats d’image.
L’un d’entre eux, la clé USB, apparaît aujourd’hui obsolète — alors que la plupart de nos dispositifs ne peuvent déjà plus la lire. Les deux autres — le tirage d’art et le NFT — sont promis à un avenir, une longévité et une capacité de subsistance dans le temps incertaines. Nous n’avons en effet pas de moyen de prévoir les chances de conservation des images d’art stockées dans des conditions muséales considérées comme idéales, ni celles d’images dématérialisée et stockées sur une blockchain, au fil des années, siècles et millénaires à venir.
A travers cette déclinaison sur des médiums aux futurs inconnus, il s’agit de révéler la fragilité et le caractère incertain de ces supports — nos supports d’images actuels — comme moyens de préservation. Elsa Leydier révèle la pauvreté de notre regard occidentalo-centré lorsqu’il s’agit d’appréhender des écosystèmes entiers et des forêts millénaires.
Par ce pas de côté, Elsa Leydier propose de regarder avec un certain recul notre relation [occidentale] à la nature, qui s'exprime par une frénésie à la représenter puis à la stocker, grâce à des techniques toujours plus évoluées... Alors que dans le même temps, nous la détruisons.
En choisissant de montrer 'Flora Brasiliensis 3.0' en parallèle de 'Les Marques’ — travail consistant en des installations comportant de véritables plantes destinées à évoluer librement au fil du temps —, il s’agit de proposer un espoir, un remède après le temps de la critique. L’artiste propose de trouver la valeur de la nature à travers l'expérience et le lien que nous entretenons avec elle — et non pas en changeant la loupe ou la focale des appareils technologiques que nous utilisons pour la regarder et l’enregistrer.
'Les Marques' permet de matérialiser l’idée selon laquelle la valeur réelle de la nature, et donc la manière la plus juste de la préserver, se situe ailleurs que dans ses représentations. Elle se trouve dans sa vie même, dans son caractère indéniablement vivant, incontrôlable et aléatoire, dans sa capacité à se développer et évoluer à travers une infinité de possibles, et enfin dans l’expérience et le lien que nous nouons avec elle.
Tirages jet d’encre sur papier fine art Hahnemühle hemp, cadres en bois, verre musée
Fichiers numériques sur clé USB
Fichiers NFT
Les images de 'Flora Brasiliensis 3.0' ont été réalisées à partir de photographies originales de Marcos Piffer et de photographies issues d'encyclopédies publiées par Liana Produções Editora et Editora Três.
Animation NFT : Leon Vilhena
Leydier